La plus douloureuse épreuve était pour eux de s’éloigner de cette maison de Rome où il leur était donné de voir leur bien aimé Père général d’admirer sa merveilleuse sainteté de jouir de sa tendresse paternelle Ils étaient si chèrement aimés de lui que chacun aurait pu se croire le fils préféré de son cœur.
On comprend la vénération que le saint fondateur inspirait à tous ses religieux quand on voit combien Dieu semblait se plaire à la justifier Les bons Pères recueillaient tout ce qu’ils pouvaient prendre leur saint général Ils se partageaient les cheveux qu’on lui coupait les bouts de papier sur lesquels il avait écrit un ordre devenu inutile par l’exécution tout ce qui venait de lui.
Il existait dans la Compagnie et cela depuis les premiers Pères de la fondation une gracieuse et poétique croyance qui ajoutait encore à la tendre vénération que le saint fondateur inspirait à tous ses enfants. […]
Le Père Laynez s’autorisant de son ancienne intimité avec Ignace et de la confiance qu’il lui avait toujours témoignée voulut savoir de lui la vérité et lui dit un jour :
— Mon Père nous sommes tous persuadés nous avons quelques motifs pour y ajouter foi que votre chère âme est confiée à la garde d’un archange. Est-ce vrai?
Ignace de Loyola baisse les yeux rougit comme un coupable ne répond pas et paraît dans le plus pénible embarras.
Extrait de Vie de Saint Ignace de Loyola par le P. J. M. S. Daurignac